Insensé celui qui somme le rêve de s'expliquer - Jean RAY - Malpertuis

jeudi 27 février 2014

Le voyage de Princesse Tortue – 1° épisode

Mots à utiliser 

un arbre
 une tortue
 mappemonde (carte/ voyage)
 livre
flèche
clef
 fleur
baguette magique
masque / peintures sur visage
rose des vents (orientation/direction)

Une tortue magique voulait voyager; elle a plongé dans la mer et nagé, nagé, nagé longtemps…
Enfin, elle a abordé dans un pays inconnu planté de pommiers eux aussi magiques ; elle a pris une pomme, l’a croquée ; dans la pomme il y avait une clef.
C’est alors que des chasseurs sont arrivés avec des peintures de guerre sur le visage ; ils ont visé la tortue. Pour  échapper à leurs flèches elle s’est cachée derrière un rocher. Le rocher était creux : c’était  une grotte et dans la grotte se trouvait  un coffre. Sur le couvercle était posée en équilibre une baguette magique. Et la baguette magique est tombée sur la tête de la tortue qui s’est transformée en princesse.
Avec la clef, la princesse a  pu ouvrir le coffre. Dedans il y avait un livre et une carte au trésor  avec en haut de la feuille, une rose des vents.
Princesse Tortue voulait  sortir de la grotte, mais les chasseurs la guettaient. Alors elle a agité la baguette magique et les flèches se sont transformées en fleurs. Princesse Tortue était  si belle que tous les chasseurs en sont tombés amoureux.
Elle a accepté de les accompagner jusqu’à leur camp et le soir à la lueur du feu, ils ont lu le livre qui racontait  l’histoire d’un trésor perdu. Sans doute, ont-ils pensé, la carte et la rose des vents indiquent l’emplacement du trésor.
Le lendemain, Princesse Tortue et les chasseurs sont partis à sa recherche.


A suivre…

mardi 25 février 2014

Acis et Galatée alm.

Acis et Galatée

Polyphème était un cyclope heureux ; Polyphème était amoureux.
Du haut de la falaise, sur le seuil de sa caverne dominant la plage, il contemplait ravi, la douce et gracieuse Galatée au corps de nacre jouant dans les vagues ; Galatée cheveux au vent qui courait dans la sable.
Chaque jour au pied d’un pin, Polyphème déposait pour elle des présents : une grappe de ses vignes, des figues, des olives, quelques fromages de ses brebis. Il savait ses fromages excellents ; moins toutefois qu’une chair crue et sanglante palpitant encore d’un reste de vie. De la chair humaine quand il s’en trouvait mais plus souvent de quelque animal sauvage et jamais en tout cas d’un membre de son troupeau qu’il aimait avec tendresse. Pas autant toutefois que Galatée, la prunelle de son œil, cette nymphe délicate pour qui chaque jour il s’ingéniait à trouver des douceurs ; la jeune personne était farouche,  il lui fallait l’apprivoiser.
Il avait bon espoir puisqu’elle ne repoussait pas ses offrandes et même, elle les partageait. Mais ça, Polyphème n’appréciait pas vraiment : c’est en compagnie d’un autre berger, ce gringalet d’Acis que la nymphe volage se régalait des présents du cyclope amoureux. Il n’était pas jaloux pourtant. Comment ce petit être fade, au corps débile aurait-il pu rivaliser avec lui, Polyphème, le cyclope, le géant aussi grand et fort que les platanes des bosquets sacrés.
Le corps glabre de cet être chétif pouvait-il se comparer au torse et aux membres couverts de la même toison noire qui faisait la beauté de ses béliers ? Ces menues boucles blondes valaient-elles la tignasse couleur d’encre et si drue qui de l’épais sourcil aux larges épaules couronnait  le sommet du géant. Les deux pâles petits yeux soutenaient-ils la comparaison avec l’œil unique,  ce large et bel oeil bordé de cils touffus aussi noirs que la charbonneuse pupille de Polyphème.
Le cyclope, pas un seul instant, ne pouvait imaginer que la belle puisse indéfiniment résister à un amour aussi puissant que celui qu’il éprouvait pour elle. Et puis, il était fils d’un dieu… pas n’importe lequel : le propre frère de Zeus, le plus puissant peut-être après le Dieu de tous les dieux, Poséidon, la maître des océans, des mers, des fleuves et de toutes les eaux du monde… Poséidon, l’ébranleur de la terre, Poséidon qui d’un seul coup de son trident pouvait envoyer les vagues engloutir un continent.
Pourtant… pourtant… Acis lui aussi était né d’un dieu. Un ébranleur de la terre et des humains à sa manière agreste et joyeuse : Pan, le prince des Satyres, Pan à la flûte enchantée, Pan qui protège les amours rustiques, Pan qui veille à la reproduction de tout ce qui vit. Et sans doute Acis avait-il appris de son père qu’on pouvait offrir aux belles des présents valant mieux qu’un fromage. Acis aima Galatée et Galatée ne lui fut pas cruelle.
Dans un creux des rochers bordant la plage, après avoir joué dans les vagues, de jour comme de nuit les jeunes gens s’aimaient. Et c’est ainsi qu’un matin, alors qu’il venait déposer pour sa belle une corbeille pleine des fruits de ses travaux, il les vit endormis aux bras l’un de l’autre. De douleur, le géant rugit .
Les vagues ont reculé, la cime des arbres en a frémi et dans un grand froufrou d’ailes les oiseaux se sont envolés. Les amants, mal éveillés, tremblants , se sont dressés face au géant furieux. Main dans la main, ils ont fui, trébuchant dans le sable. Le cyclope, arrachant des rochers à la grève a fait un pas et balançant un bras, il a visé Acis. Et la roche a frappé le berger.
Etendu sur le sable, le sang avec la vie s’écoulait de son corps se mêlant aux larmes intarissables de la nymphe au désespoir. Tant et tant de sang et de larmes pour un amour si grand ne pouvaient se tarir… le flot en coule encore : au pied de l’Etna, Acis est devenu fleuve…

vendredi 21 février 2014

Circeline



Il y a longtemps, bien longtemps, pas très loin d’ici entre Beauce et Perche, naquit une petite fille ; la dernière née d’une famille de magiciens qui, en dépit de tous leurs sortilèges n’avait pu engendrer que des garçons. Or, certains de leurs pouvoirs ne pouvaient être transmis que par les femmes ; aussi avait-on craint de les voir disparaître. C’est vous dire si la jeune Circeline était la bienvenue !
Dans les jours qui suivirent la naissance, toute la parenté, tous les proches, magiciens et magiciennes, sorciers et sorcières, fées, enchanteurs, lutins, elfes, tous se réunirent autour du berceau pour doter l’enfant. C’était un ravissant bébé que chacun se faisait une joie de gâter, et comme cette parentèle était nombreuse, Circeline fut bientôt pourvue de tous ,je dis bien TOUS les dons. Et quand les nourrices réclamèrent un peu de repos pour la mère et l’enfant, chacun se disposa à regagner la salle voisine où un festin était préparé.
Alors entra dans la chambre celle qu’on n’attendait pas car on l’avait complètement oubliée : une vieille fée, fort âgée et méchante que personne n’aimait ni ne recherchait. On redouta sa réaction ; déjà son naturel n’était pas bon, en plus, elle était certainement vexée d’avoir été écartée de la fête. On cherchait fébrilement comment conjurer le mauvais sort qu’elle ne manquerait pas de jeter à la petite. Elle s’approcha du berceau avec un mauvais sourire (elle n’en avait pas d’autre), regarda la petite fille, puis l’assemblée qui s’efforçait de garder un air détaché ; alors d’une voix trop suave pour être sans arrière pensée, elle susurra : « Jolie, jolie petite Circeline… on t’a déjà tout donné ! Que me reste-t-il à moi pauvre vieille, à t’offrir en cadeau ? »
Elle fit semblant de réfléchir pendant un moment qui parut bien long. On redoutait le pire ; puis, s’adressant à la parentèle inquiète : « Est-elle encore mortelle ? »
L’assemblée des magiciens, bouche bée dévisagea la vieille fée. « Comment, reprit-elle, aucun d’entre vous n’a pensé à lui offrir l’immortalité ? Quelle chance pour moi ! Je n’espérais pas ma jolie Circeline, pouvoir te gâter ainsi ! »
Et sans laisser à personne le temps de réagir, elle fit au-dessus du berceau les gestes magiques qui confirmaient ses paroles.
L’immortalité !… Personne c’est vrai, n’y avait songé ! Car, si magiciens, sorciers, enchanteurs, parviennent grâce à leurs pouvoirs à une étonnante longévité, parfois de plusieurs siècles, tous sont mortels. La preuve : de nos jours, on n’en rencontre presque plus. L’assemblée était grandement soulagée ; étonnée aussi car il n’était pas dans les habitudes de la vieille de se montrer aussi généreuse. On s’empressait autour d’elle la priant de rester à la fête, mais elle déclina l’invitation et s’éclipsa nos sans émettre lueurs et bruits bizarres qui effrayèrent le bébé. Ceci lui ressemblait déjà plus ! On se congratulait du peu d’importance de l’incident, quand un magicien chenu qui s’était tenu jusque là silencieux et discret, presque invisible dans l’ombre d’une tenture, s’avança devant le feu. Lui aussi on l’avait oublié, bien qu’il ait été invité, car il était respecté pour son savoir et sa grande sagesse. On réalisa alors que lui non plus n’avait pas fait de don. Que lui restait-il à offrir ? Cependant on ne le redoutait pas car sa bonté égalait son savoir. Il s’approcha du berceau et regarda, on se demandait bien pourquoi, le bébé avec commisération.
« Pauvre petite bonne femme ! dit-il avec douceur. Tous les dons et l’immortalité ! Comme cette enfant va s’ennuyer ; la vieille folle ne pouvait pas faire pire ! »
On trouvait autour de lui qu’il exagérait et on se mit à craindre qu’il ne retirât à l’enfant quelque don précieux ; il en avait le pouvoir. Mais il se contenta de dire gentiment : « Je ne peux rien ajouter à ce que tu as reçu ; aussi vais-je t’enlever un petit quelque chose. Oh, presque rien, fit-il rassurant, simplement cette enfant ne pourra jamais chanter. »
Il fit les passes magiques et retourna dans son coin. On se regardait, interloqué ; soulagé aussi ! Un sage comme lui, s’attacher à un pareil détail… on mit sa réaction sur le compte de la sénilité.
Circeline fut un bébé sage. Elle souriait beaucoup, pleurait rarement et criait encore moins : forcément, elle ne pouvait pas élever la voix ! Elle grandit comme une jeune magicienne ordinaire, dans une famille de magiciens ordinaires. Quand elle en eût l’âge, on l’envoya à l’école des magiciens où elle apprit avec facilité. Normal, avec tous ses dons ! Dans cette école, on étudiait bien évidemment les sciences occultes, les philtres magiques et les phases de la lune, mais aussi la lecture, l’écriture, le calcul, le dessin et… le chant ; comme dans les autres écoles.
Circeline dut se joindre à la chorale et connut là ses premières contrariétés. La fillette, qui adorait la musique et les chansons, entonnait avec enthousiasme refrains et couplets mais comme elle n’avait pas plus d’oreille que de voix, elle ne se rendait pas compte qu’elle déraillait. Bien vite on la faisait taire. A la fin du morceau le professeur de chant lui disait : « Fais un effort, Circeline ! Les autres, taisez-vous, Circeline reprendra seule le refrain. » Et la pauvrette de lancer à pleins poumons un fausset chevrotant sous les rires de ses compagnes qui pour être magiciennes n’étaient pas plus tendres que les autres enfants.
« Bon, ça suffit, dit un jour le prof écoeuré. Tu resteras après l’heure, je te ferai travailler. »
Circeline ne prit pas cela comme une punition, au contraire ; elle était enchantée d’avoir une leçon particulière. Leçon qui porta peu de fruits : ni voix , ni oreille, elle dut quitter la chorale. Circeline rentra chez elle le cœur gros ; elle qui réussissait tout sans effort, voilà qu’elle était privée de ce dont elle avait le plus envie. Sa mère voyant son chagrin, jugea qu’il était temps de révéler à sa fille l’enchantement dont elle était victime.
« Ca ne fait rien, dit Circeline quand elle fut au courant, j’apprendrai. J’ai tout le temps puisque je suis immortelle. »
Ce qu’elle fit ! Le fausset de la jeune magicienne découragea plus d’un maître de musique. Mais elle voulait chanter et persévérait dans la recherche de celle ou celui qui délivrerait sa voix prisonnière.
Cependant elle continuait à s’instruire et lisait beaucoup. C’est ainsi qu’elle apprit que loin, très loin, au sud de son pays, il existait une mer dans laquelle vivait des êtres surprenants : les Sirènes. Les Sirènes savaient chanter ; on disait même que leur voix était si belle qu’elle ensorcelait tout voyageur qui les approchait.
« Voilà ce qu’il me faut, se dit Circeline. Ces Sirènes vont m’apprendre le chant. »
Elle n’était plus une enfant quand elle entreprit le long voyage qui devait la mener jusqu’à la Mer des Sirènes. Ce qu’elle fit là-bas, nous n’en savons rien ; toujours est-il que durant son absence, le pays connut quelques années d’une exceptionnelle sécheresse. Puis elle revint ; et l’on doit croire que ni la science, ni le talent, ni même la magie des Sirènes n’ont pu faire éclore la voix de Circeline, puisqu’à son retour, une pluviométrie normale, c’est à dire abondante, reverdit la région.
Et c’est ainsi depuis des siècles ; Circeline cherche sa voix sans jamais la trouver. Vous l’entendez de loin en loin à la radio, à la télé : jolie, pimpante, dansant à la perfection, un filet de voix couvert par l’orchestre et la sono. Brune ou blonde, grande ou petite selon les époques et les modes qu’elle suit scrupuleusement, c’est toujours Circeline. Et puis, la vedette se laisse oublier ; car au nombre de ses dons, Circeline compte la lucidité. Alors elle repart chez ses amies les Sirènes et nous connaissons quelques étés ensoleillés ; puis elle revient à temps pour reconstituer les nappes phréatiques exsangues.
Car jamais, jamais, tout au long de son éternité et en dépit de l’enchantement qu’elle ne peut défaire, Circeline ne renoncera à chanter….
Elle vient d’apprendre que sur un fleuve de l’Est, une certaine Lorelei….
Tant il est vrai que : IL N’EST PAS NECESSAIRE D’ESPERER POUR ENTREPRENDRE, NI DE REUSSIR POUR PESEVERER .

mercredi 19 février 2014

Chansons de mes envies




Ce matin, j'avais envie d'être un nuage....
Alors je me suis couchée dans la rosée et j'ai attendu...
J'ai attendu le soleil.
Il avait soif et il m'a bue
Et on est tous les deux remontés dans le ciel
Et moi, je voulais sortir
Alors j'ai pris une de mes plumes et je lui ai chatouillé le nez
De l'intérieur
Et il a éternué
Il m'a éternuée
Et longtemps dans le ciel, j'ai flotté
Légère
Par-dessus les montagnes et par dessus les plaines
Par dessus mon village
Et j'ai vu mes amis qui mangeaient de bonnes choses
Qui riaient, qui chantaient
Alors j'ai eu envie d'être avec eux et je me suis faite pluie
Et je suis tombé sur leur feu
Il s'est éteint
Ils ont levé les bras au ciel et il m'ont vue
Ils m'ont tapé dans le dos
Ils ont dit:"Sacré farceuse!"
Alors on a rallumé le feu et on a bu
On a mangé, on a chanté
Et raconté les histoires de nos envies.

mardi 18 février 2014

Pourquoi 28 jours?


Que penser de ce mois bancal, amputé de trois jours et qui court en boitant pour, tous les quatre ans, en récupérer un?
C'est un mois fièvreux, son nom l'indique. Il est froid, humide; il arrive qu'une belle journée fasse croire au printemps, on tombe la veste, on dénoue l'écharpe, et  Bronchite en profite. Elle s'insinue accompagnée de Fièvre et de Toux, ses deux complices qui, si elles le pouvaient encore résoudraient définitivement vos menus problèmes. On nommait autrefois février "mois des fièvres" ou "mois du Purgatoire", c'est dire!
Est-ce pour diminuer le danger qu'il ne lui a été donné que vingt-huit jours?
Tout a commencé quand Jules César a appris que la Terre fait sa révolution autour du Soleil en trois cent soixante cinq jours et six heures. Homme de lois et de réformes, il a réformé le calendrier. L'année tropique allait comporter trois cent soixante cinq jours; mais que faire alors de ces six heures supplémentaires. Pour obtenir une journée complète on allait les multiplier par quatre et tous les quatre ans, cette journée serait ajoutée à février à qui n'avaient été octroyés que vingt neuf jours. 
Journée qui serait insérée, (pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué?)entre la vingt quatrième et la vingt cinquième. Ainsi en décida César qui, comme chacun sait périt aux Ides de mars.
Auguste, son neveu monta sur le trône impérial et s'avisa que le mois d'août qui lui était consacré ne comportait que trente jours, alors que Juillet, mois de son oncle défunt en comptait trente et un. Un manque d'égards qu'il fallait réparer et ce fut encore ce malheureux février qui en fit les frais: on lui piqua un jour.
C'est depuis se temps que février doit se contenter ordinairement de vingt huit jours, bienheureux encore d'en avoir vingt neuf les années bissextiles. Des jours longs de dix heures en moyenne, soit une augmentation d'une heure et trente-huit minutes pour l'ensemble du moi.

jeudi 6 février 2014

Révélation

Je révèle maintenant que Dieu a placé des gardiens et des veilleurs sur tout ce qu'il a fait. En ce sens, les gnomes ou pygmées, veillent sur tous les trésors, métaux et pierres précieuses cachés dans la terre. Il y a des trésors entassés, surveillés par ces petits êtres afin qu' ainsi rien ne soit produit avant le temps approprié. Quand les trésors sont déterrés, les pygmées disparaissent, ne laissant derrière eux que des histoires et des mythes sur leur existence et leurs travaux.

PARACELSE

lundi 3 février 2014

Comment est née sur la steppe la "Viole à Tête de Cheval

Tout au nord de l'Europe, presque en Chine, les cavaliers mongols galopent à travers la steppe. Le soir dans la yourte, ils chantent et jouent d'une étranjge viole dont le manche se termine en tête de cheval. C'est le morin-tehour et le morin-tehour a une histoire.
Figurez-vous qu'autrefois, un jeune garçon qui se nommait Suho vivait seul avec sa grand-mère. Ils étaient très pauvres. Lui était berger et malgré son jeune âge il travaillait dur; autant et souvent plus que bien des hommes. Il se levait à l'aube pour aider sa grand-mère aux soins du ménage et des repas, puis il s'occupait des moutons et des bergeries avant d'emmener la vingtaine de bêtes qui composaient son troupeau pâturer sur la steppe.
Suho aimait chanter, il avait une belle voix, connaissait beaucoup de chansons et les autres bergers aimaient à l'entendre. 
Un soir,alors que  le soleil avait disparu derrière les montagnes, la nuit s'étendait sur la steppe et Suho n'était pas rentré. La grand-mère était bien inquiète, les autres bergers allaient partir à sa recherche, quand le garçon est arrivé portant dans ses bras un animal tout blanc, bien trop gros pour être un mouton. Suho était fou de joie; il avait trouvé un poulain nouveau-né qui s'agitait pour se dresser sur ses faibles jambes; la mère as là pour l'aider. Il avait regardé partout: ni jument ni humain ne se trouvait dans les parages et le poulain risquait bien de finir sous les crocs d'un loup, alors il l'avait pris avec lui.
Du temps passa; Suho avait nourri au lait de brebis le poulain que personne n'était venu réclamer et qui grandissait comme grandissait l'amour entre le Suho et Cheval Blanc. Bientôt la robe immaculée à laquelle il devait son nom fit l'admiration de tous et jamais cheval ne fut soigné et aimé comme le fut Cheval Blanc qui ne se contentait pas d'être beau. Il était brave aussi et savait se rendre utile, comme pendant cette nuit où un vacarme insolite éveilla Suho: les moutons s'agitaient et bêlaient, Cheval Blanc hennissait et des grognements féroces se faisaient entendre du côté de l'enclos. Le berger ne fit qu'un bond pour voir Cheval Blanc dressé et menaçant de ses sabots un grand loup affamé.
Les loups sont peureux et Suho n'eut aucune peine à le faire déguerpir. Cheval Blanc avait eu très peur; il avait sauvé les moutons mais il était trempé de sueur. Suho le caressa, l'étrilla tout en le remerciant comme un frère.
Du temps passa encore, puis voilà qu'au printemps une grande nouvelle courut sur la steppe: le seigneur du pays allait donner sa fille en mariage au vainqueur d'une grande course qu'il organisait. Tous les bergers encourageaient Suho à y participer: monté sur Cheval Blanc, il n'aurait aucune peine  à remporter la victoire. Et c'est ainsi que Suho enfourcha Cheval Blanc pour se rendre à la ville. 
Il y avait foule autour du champ de course. Majestueux sur une estrade, le seigneur donna le signal du départ. Ce fut une course magnifique. Des jeunes gens, riches pour la plupart montés sur les plus beaux coursiers venus des provinces les plus reculées filaient comme le vent, les sabots martelant le sol dans un bruit de tonnerre. Bientôt on ne vit plus qu'un éclair blanc qui devançait tous les autres: c'était Cheval Blanc qui, portant Suho faisait voler la poussière de la steppe. 
Le seigneur admiratif le proclama vainqueur et fit venir devant lui cheval et cavalier. Mais quand il apprit que Suho n'était qu'un pauvre berger, il renia sa promesse; sa fille ne pouvait prendre un si pauvre homme pour époux!
"Tiens, dit-il au jeune homme, voilà pour toi trois pièces d'argent et je garde ton cheval."
Suho, fièrement lui répondit qu'il était venu là pour la course et non pour vendre son cheval! 
Un berger ne parle pas sur ce ton à un seigneur des steppes! Le maître furieux fit rosser Suho par ses valets. Le malheureux perdit connaissance tandis que des palefreniers conduisaient Cheval Balnc aux écuries du seigneur.
Les bergers amis de Suho le ramenèrent chez lui sanglant et couverts de bosses. Sa grand-mère mit longtemps à le soigner. Ses plaies finirent par se refermer mais pas celle qui saignait en son coeur. Il ne pensait plus qu'à son Cheval Blanc qu'il avait perdu. Desespéré de ne pas savoir ce qu'il était devenu, il ne dormait plus, mangeait à peine...
Le seigneur, lui n'en pouvait plus d'orgueil; fier de s'être emparé d'un si beau cheval, il voulut le montrer aux seigneurs ses voisin. Il les invita à une grande fête et à l'issue d'un festin, il fit amener Cheval Blanc et eut la mauvaise idée de le monter. A peine fut-il en selle que le cheval rua, se cabra, fit des sauts de mouton tant et si bien que le seigneur vida les étriers. La chute fut rude et il lâcha les rênes. Cheval Blanc se sentant libre partit au galop...
Le Seigneur furieux hurlait; " Rattrapez-le, rattrapez-le!!"
Mais on ne pouvait pas rattraper Cheval Blanc. Alors il ordonna à ses archers de tirer sur lui. Une volée de flèches se planta dans son dos, mais il continua sa course folle.
Suho, qui allait se coucher triste comme à l'accoutumée, entendit une galopade. La grand-mère qui n'était pas encore rentrée lui cria: "Suho, Suho! C'est cheval blanc qui revient!"
Suho sortit en courant. Oui, c'était bien son Cheval Blanc, mais sa belle robe était rouge de sang, les flèches lui déchiraient le dos et les flancs. Suho en larmes les retira doucement une à une, mais Cheval Blanc épuisé s'était couché et perdait des flots de sang. Le berger eut beau le panser, le soigner, le supplier de boire, de manger, de ne pas mourir, il était de plus en plus faible . Au matin, il ferma les yeux.
Suho pensa mourir avec lui de chagrin. Il pleura, sanglota à en perdre les yeux. Terrassé de fatigue et de désespoir, il finit par s'endormir... Il eut un rêve: Cheval Blanc se serrait contre lui et tandis qu'il le caressait, le cheval lui parla: "Prends mes os, lui dit-il, prends ma peau, mes crin, mes tendons. Tu en feras un viole et chaque fois que tu chanteras c'est moi qui t'accompagnerai. Ainsi, personne ne nous séparera plus.
Suho se leva, fit tout ce que Cheval Blanc lui avait dit; bientôt il eut fabriqué un magnifique instrument 
dont il sculpta le manche à la ressemblance de son cheval aimé. Bien sûr cette viole lui rappelait la perte de son ami, mais aussi la joie qu'il avait eue en galopant avec lui à travers la steppe. Il en tira la plus belle musique du monde. Le soir, autour du feu, dans la yourte, les bergers en oubliaient la fatigue du jour. Dans toute la steppe, les musiciens voulurent égaler Suho et se mirent à fabriquer des violes à tête de cheval; ils en fabriquent encore. Mais aucune jamais n'aura les accents de celle qui perpétua l'amour d'un jeune garçon pour un beau cheval blanc!

Les Chouchous