Insensé celui qui somme le rêve de s'expliquer - Jean RAY - Malpertuis

jeudi 26 septembre 2013

Les Nouveeaux Contes de Fées de la Comtesse de Ségur

(5)Ourson-

 Bien qu’évoquant la Belle et la Bête, bien que truffé de merveilleux, cette dernière histoire qui commence d’ailleurs comme les Mémoires d’un âne, n’est déjà plus un conte. L’auteur puise carrément dans sa vie et ses souvenirs et l’on voit le roman pointer sous le conte dont elle oublie la rigueur. Les dialogues et les descriptions de lieux et de personnes sont sommaires dans les contes où seule compte l’action. On pourrait dire qu’Ourson est le premier roman de la Comtesse de Ségur et que la romancière est née de la conteuse grâce à son talent de dialoguiste et son sens aigu de l’observation.
L’écriture se libère, l’humour apparaît avec les dialogues et reflètant celui de la conteuse.
Agnella la fermière, vit seule avec Passerose sa servante. Tous les mardis, elle va vendre au marché de la ville voisine qui pourrait aussi bien être celui de Laigle, les produits de sa ferme ; et si l’âne ne se nomme pas Cadichon, il l’évoque bel et bien.

Un jour, Agnella  donne un coup de pied à un crapaud qui voulait manger ses cerises.
Furieux, le crapaud qui n'est autre que la fée Rageuse, la maudit et la condamne à avoir un fils couvert de poils. Mais la fée Drôlette sous la forme d'une alouette atténue la malédiction en accordant  au garçon la possibilité de changer de peau avec qui l'aimera assez pour consentir au sacrifice.
Trois mois plus tard, Agnella accouche d'un bébé poilu que l'on baptise Ourson. Ourson grandit mais ne s'éloigne guère de la ferme car son apparence effraye le voisinage.
A l'âge de huit ans l'enfant trouve dans les bois une petite fille abandonnée. D’abord craintive, elle adopte vite le "petit ours" et lui dit se nommer Violette. Le langage que Sophie prête à Violette enfant est vraiment celui d’une petite fille. Elle fera mieux encore plus tard,  avec Marguerite.
La fée Drôlette révèle à Agnella que Violette est sa nièce, que le roi Féroce veut tuer; elle charge Agnella de l'élever et lui confie une cassette qu'elle doit cacher soigneusement. La petite Violette a bien de la chance: elle a trouvé un Nounours qui parle et qui prend soin d’elle comme un grand frère. De plus, peu satisfaite de sa mère naturelle, elle est ravie d’en changer et de se faire adopter par Agnella, la mère d’Ourson. Cette situation se retrouvera souvent dans l’œuvre de Sophie de Ségur. Elle-même avait adopté un de ses neveux,  mal aimé du reste de la famille.
Un jour, Agnella révèle à son fils qu'il peut changer de peau avec Violette. Ourson refuse. Rosalie dan le conte précédent, rêvait du prince charmant, rêve banal; en revanche, celui de Violette, est chargé de sens prémonitoire: un crapaud, symbole masculin, entraîne  Violette dans l’eau, symbole féminin et Ourson n’est plus là pour lui tenir la main. Il semblerait que ce rêve, contrairement à d’autres rencontrés au fil de ses romans, qui ne sont là que pour illustrer une moralité, que ce rêve ait vraiment fait partie des cauchemars de l’auteur, qui redoutait l’eau et la noyade. On se demande aussi pourquoi le crapaud en principe symbole sexuel masculin, représente curieusement un personnage féminin: la fée Rageuse.
Les années passent; Violette,a dix ans et Ourson, qui en a quinze, se charge de l’instruction de Violette, lui apprend à lire, à écrire et à compter.
Et voilà que le rêve devient réalité : le crapaud fée Rageuse tente de noyer Violette; Ourson se jette à l'eau et la sauve. Empoisonné par la bave du crapaud, que Sophie décrit assez comme un moderne désherbant, le garçon tombe malade; il va mourir.  Violette le  veille. La fée Drôlette intervient  et  lui propose de racheter la vie de son compagnon au prix d'un terrible sacrifice qui lui sera demandé plus tard. Violette accepte et Ourson guérit. Tout le monde s’embrasse et pleure, mais Sophie  tempère l’émotion par de l’humour: « Passerose pleurait aussi pour tenir compagnie à Agnella ». Les deux enfants s'aiment de plus en plus.
Un jour, Ourson part couper du bois dans la forêt. Violette, en lui portant son déjeuner, est attaquée par un sanglier furieux qui fait claquer l’une contre l’autre ses défenses  .
Pour lui échapper, elle grimpe en haut d'un arbre; elle appelle au secours, mais en vain. C'est le soir, en rentrant, qu'Ourson entend les cris de son amie. Armé de sa hache, il attaque le sanglier mais la bête le charge et sans l'intervention de Drôlette, il serait piétiné. Ce sanglier, étant envoyé par Rageuse, est donc maléfique, c’est l’animus de la mauvaise mère, son agressivité déchaînée.
Les deux enfants passent la nuit dans les bois. Quand le jour se lève, ils retrouvent le chemin de la ferme.
Trois ans se passent. La ferme d'Agnella est ravagée par le second incendie de l’œuvre de la comtesse de Ségur. Ourson, intrépide, met tout le monde hors de danger. Passerose a pensé à sauver nourriture et vêtements, mais Agnella a oublié la cassette. Ourson retourne dans le brasier pour la récupérer ; c'est alors que la toiture s'écroule sur le jeune homme que l'on croit mort. Deux jours plus tard, en aidant à déblayer les décombres, Violette découvre l'entrée d'un puits et entend la voix d'Ourson, sauvé encore une fois par la fée Drôlette; on descend une échelle pour l'aider à sortir.
Ils n'ont plus rien; Ourson part chercher du travail. Mais à la ferme, comme au château, comme à la forge son apparence effraye ou rebute, il est repoussé de partout. Ourson veut se faire employer à la forge d’Aube dont le patron, pourvoyeur de travail et néanmoins détesté pour son intransigeance, annonce l’industriel Féreor dans La Fortune de Gaspar.  La comtesse ultramontaine n’a lu ni Marx ni Engels et pourtant… elle n’aime pas les patrons!
Violette à qui la fée Rageuse a révélé la nature du sacrifice qu'elle doit faire, accepte de changer de peau avec Ourson. La fée Drôlette apparaît. Ourson la supplie de refuser le sacrifice de Violette; Violette insiste; la fée opère la métamorphose. Rageuse triomphe, Drôlette se fâche ; elle sait comment rendre à Violette sa beauté. Les deux fées se battent, char aux crapauds contre char aux alouettes.
La reine des fées soutient Drôlette, exit Rageuse.
La fée envoie Ourson désormais nommé prince Merveilleux chercher au fond  du puits la cassette qu'on y avait oublié; elle contient une huile parfumée qui va faire tomber les poils de Violette et lui rendre sa beauté.
La fée Drôlette assiste aux noces de Violette et d'Ourson- Merveilleux...
Les affaires des rois et des reines s’arrangent comme Sophie aurait souhaité arranger les siennes.
Elle est la reine Aimée, mais qui est le génie Bienveillant qui l’enlève un beau jour « comme dans un tourbillon » et qui lui accorde l’ubiquité dont elle pense tant avoir besoin?
Ourson à la fin du conte a perdu ses poils, pour épouser Violette; car il est peu recommandé aux petites filles, modèles ou pas, d’introduire leur Ourson dans le lit conjugal. Sophie pour sa part, y avait apporté trop de slave rigueur, si l’on songe à sa literie de papier journal ou à son encombrante bouillotte en caoutchouc, auxquels elle ne pût renoncer ni son mari s’y accoutumer.


1 commentaire:

manouche a dit…

Ya pu d'crapiaux, où vont se nicher les méchantes fées ?

Les Chouchous